Mes très chers,
C'est une bien douce mission pour moi de vous offrir mes meilleurs remerciements pour mon 90 ième anniversaire de naissance. Les mots me manquent pour vous exprimer toute ma gratitude.
Merci Marie pour ton oeuvre d'art qui est ton album de famille. Reconnaissons qu'il est réalisé par une artiste. Quel beau cadeau!!!
Merci Gaby pour ton diaporama des plus intéressants. J'aime à le regarder plus d'une fois. Quel beau cadeau!!!
Merci à Raynald et à Claire pour les textes d'hommages si bien présentés. N'est-ce-pas que Claire est bonne animatrice!!!
Merci Madeleine pour le bien cuit que tu nous a servi. C'était excellent.
Merci Hélène pour ce dévoilement du blog si merveilleux à parcourir. C'est l'ouvrage d'une artiste. Quel beau cadeau.
Merci Jacynthe pour ta grande participation au succès de cette fête.
Merci à notre photographe et musicien Gilles.
Merci à Claude et Jean pour leur participation.
Merci Martine d'être venue de si loin pour fêter ce 90ième. J'ai bien apprécié ta promenade chez moi, ce fut trop court.
Merci à tous mes petits enfants, à leur belle participation.
Je vous embrasse tous bien fort...
Vous m'avez servi un regain de vie heureuse, merci
Celle qui vous aime.
XXXXXXXXXX
maman Fernande

Bonne fête à une dame de 90 ans

Chère maman,

À 90 ans, nous pouvons presque dire que vous faites 90 pages d’une histoire assez remarquable. Vous avez été témoin de grands événements qui ont marqué le 20ème siècle, on peut même dire que vous en avez été une figurante à certains moments. Combien de personnes ici se sont déjà vues aller travailler ou assister à la messe de Noël dans une carriole tirée par un cheval?

Combien ont étudié sous une lampe à l’huile ou cuisiné sur un poêle à bois devant servir aussi de chauffage? Combien ont tiré leur eau d’une pompe manuelle et lavé leur linge à la main? Combien, comme vous, ont vu le Québec passer de la campagne à la ville et de la planche à laver aux électroménagers automatiques et informatisés en moins d’un quart de vie?

Comme enseignante, vous avez connu les écoles de rang chauffées au bois et à
degrés multiples dans les années 1937-38. Plusieurs de vos enfants ont suivi vos traces dans ce métier, mais certainement pas dans les mêmes conditions.

En 1962, pour vous reposer de la maison, disiez-vous, et pour faire entrer à la
maison un deuxième revenu afin de pouvoir nous faire instruire, vous effectuez un retour dans le métier à l’école du village de L’Ascension cette fois, beaucoup plus grande et bourrée de baby boomers. Fallait le faire! Alors qu’il en restait presque la moitié à la maison, il a fallu vous recycler en suivant des cours par les soirs, sans compter un stage à Sherbrooke. Et il fallait faire tout ça en continuant la routine à la maison! Tout un contrat!

Vous avez donc vu défiler plusieurs générations. Vous faites partie, le saviez-vous? de ce que des sociologues appellent la génération silencieuse, qui a précédé celle bien plus bruyante des baby boomers, dont on peut dire sans grand risque de se tromper que vous avez fortement contribué à faire gonfler la moyenne : 12 enfants, 15 grossesses en moins de 20 ans...

Votre génération est dite « silencieuse », probablement parce que peu encline à contester, donc conforme aux modèles sociaux et religieux de l’époque. Et un peu fataliste : elle plaçait la religion au centre de ses modèles et répondait à une grande mission sociopolitique de peuplement en faisant beaucoup d’enfants. Tout ce que va
renverser la génération suivante.

Vous avez donc, maman, autour de votre table plusieurs de ces générations :
la silencieuse, la Boomer, la X, la Y… La prochaine s’appellera probablement la C, mais nous sommes à peu près sûrs que vous pourrez bien vous entendre avec elle.

Si nous pénétrons maintenant un peu plus profondément dans la personnalité
de Fernande, nous découvrons une femme résolue et versatile. La danse en ligne, par exemple, caricaturerait bien le personnage: elle seule a le pas. Regardez-la aller. Elle ne suit pas la musique, c’est la musique qui la suit. Et si les autres, de Fernande ou de la musique, ne savent pas qui accompagner, c’est à leurs risques et périls : son coup de hanche est très précis. En réalité, comme pour la musique, elle n’écoute pas toujours.

C’est probablement que la mère hyper-responsable qu’elle a toujours été a longtemps orchestré l’aiguillage des départs et des atterrissages comme une contrôleuse aérienne dans les aéroports. Ici, le Clément des vendredis soir en
attente pour atterrir. Là, le Clément du dimanche soir, en attente pour repartir. Départs pour les envolées des études à l’extérieur. Atterrissages forcés des filles le samedi soir. Départs d’urgence pour les accouchements et pour la grand-messe du dimanche matin! Atterrissages forcés pour le chapelet, pis « Pisse pis monte pis couche! ». Décollages nécessaires pour les bleuets, fallait acheter nos fournitures scolaires! Aujourd’hui, du haut de sa tour de 9 étages, la contrôleuse aérienne
se contente, à la retraite, de regarder passer les avions au-dessus de Québec.

Nous nous plaignions parfois que vous étiez sévère. Mais à onze dans la maison, avec les devoirs autour de la table, le caractère de l’un puis de l’autre, les bébés et les bobos en même temps que les ados, le quotidien de la maison en même temps que le quotidien à l’école, et plus souvent seule pour voir à tout, car papa travaillait à
l’extérieur, qui n’aurait pas été tenté de serrer la vis un peu fort au lieu de démissionner?

Manfleur, qui a passé sous ou au-dessus de toutes les révolutions, navigue
maintenant sur Internet. Son site préféré est cyberpresse pour … les mots croisés. On la reconnaît pleinement dans ce loisir : détermination, acharnement, sens de la perfection. Elle ne lâche son mot croisé que lorsque que c’est écrit BRAVO! VOUS
N’AVEZ AUCUNE ERREUR! C’est l’histoire de sa vie, cette phrase. Elle n’a jamais voulu faire trop d’erreurs.

Elle est une des plus fidèles sur le clavardage du dimanche matin. Heureusement que la messe du samedi soir compte maintenant pour celle du dimanche matin!! Elle peut chatter avec ses enfants.

C’est donc la femme qui a évolué dans chacune des étapes de sa vie, passant d’une société tricotée serrée à une société tolérant et glorifiant plein de mailles manquées, survivant aux petites et grandes batailles de la vie courante.

Mme Collard, c’est un peu l’hyper active du Manrèse. Elle fréquente assidument la chorale et on la réclame au piano. Elle boude la salle à manger et se fait un point d’honneur de cuisiner à son appartement. On peut d’ailleurs la soupçonner
d’étendre un peu son territoire sur l’étage avec ses odeurs personnelles : ses muffins aux bleuets, par exemple. Des muffins bien sûr pour sa visite, mais aussi pour
Monsieur le Curé. Alliez-vous vous en étonner?

Outre la danse en ligne, notre nonagénaire a plusieurs passions : la musique,
l’opéra, le Grand Théâtre, la lecture, le cinéma et le bien paraître… Elle cultive même ce qui relève presque du vice caché : le jeu. Casinos à Las Vegas, cartes et chromino à son appartement, etc. Et là encore, elle aime gagner et se faire dire : BRAVO! VOUS N’AVEZ AUCUNE ERREUR! Avis à tous : quand elle gagne, elle dort mieux après.

Elle a toujours eu un côté « sport extrême » : le temps des quilles à l’Ascension, la raquette, le triporteur, la nage marchée-parlée à la piscine du Manoir… Elle ne se fait pas prier pour tenter de nouvelles expériences : un voyage en hélicoptère au
dessus du Grand Canyon, le dangereux 3 roues motrices à L’Ascension et le ski-doo planning avec Clément, le catamaran au lac Kénogami, le métro de Paris et maintenant l’autobus de la ville : elle a entrepris de s’initier au transport en commun à 90 ans! Il y a des fois qu’elle paie le lendemain, mais on a beau vouloir la
raisonner, dans ce temps-là, elle est comme une enfant…

Astreinte à une vie frugale, elle a été longtemps la reine du recyclage pour nous habiller. Elle a décousu des robes, des pantalons pour recoudre d’autres robes, d’autres pantalons, de nuit comme de jour.

Elle a été une adepte du tissage (on a les meilleures serviettes à vaisselle de tout le Québec!) et du tricot! (15 paires de bas en moins de 2 mois?)

Mais pour cerner le phénomène Fernande, il faut associer son histoire personnelle à celle de la société en général. Alors collons-nous un peu à sa chronologie. Regardons-y de plus près :

1919, un 19 mai : Les premiers vols commerciaux entre Paris et Londres transportent jusqu’à 10 passagers; au Québec, les syndicats signent leurs premières conventions collectives; la semaine de travail baisse à 48 heures. La première guerre mondiale vient de finir et la vie de Fernande vient de commencer à L’Ascension-de-Notre-Seigneur.

1929. En France, Hergé publie les premières aventures de Tintin, Al Capone fait la loi à Chicago, le yo-yo est inventé, le dirigeable Graf Zeppelin fait son premier tour du monde, le premier film parlant sort en France, la bourse de New-York s’effondre. La petite Fernande a 10 ans et n’a aucune idée de ce qu’est un krach boursier. Elle est chanceuse, elle vit sur une terre et elle ne souffrira pas de la faim.

1939. La première fission nucléaire vient d’être réalisée. Le monde est en ébullition. Une deuxième guerre mondiale vient traverser la vie de Fernande. Un homme et son péché passe à la radio pour la première fois. Fernande a 20 ans et enseigne dans une école du rang 7, à L’Ascension depuis 1936. C’est une école chauffée au bois. Tout le monde gèle! Elle gagne 15$ par mois. Elle a connu ses premiers amoureux. Mais le Canada entre en guerre et, comme beaucoup d’autres femmes autour d’elle, Fernande est à la veille de se voir engagée non par l’armée, mais dans une course au mariage imprévue. Elle vient tout juste d’obtenir le droit de voter. Elle a 30 ans. Le gouvernement d’Adélard Godbout est le dernier gouvernement au Canada à faire adopter une loi accordant aux femmes le droit de vote et d’éligibilité lors des élections provinciales, et ce malgré une forte opposition des évêques et de Maurice Duplessis.

Dans la lutte collective pour lutter contre la conscription, elle se marie donc l’été
suivant, le 14 juillet 1940, dans un contexte tragicomique de mariages collectifs. Cette course est le prélude d’un véritable marathon de maternités qui durera une
trentaine d’années. La vie de Fernande est intimement liée à ce marathon. Si on se fie à ce qu’elle nous en dit, voici à peu près la fable qu’on pourrait raconter :

En 1941, La guerre en Europe fait rage. Ici, Alcan annonce la construction de son
aluminerie à Arvida et le gouvernement d’Adélard Godbout adopte une loi permettant aux femmes de devenir avocates.

Vendredi soir, la porte s’ouvre sur Clément. Dimanche après midi, la porte se ferme, ils se reposent, ouais! Dimanche soir il part...Lundi matin, Fernande TOMBE enceinte... Neuf mois plus tard elle TOMBE malade..Puis se RELÈVE:C’est Léonce.

1943. Le gouvernement du Québec adopte la loi sur l’instruction obligatoire pour
les enfants de 6 à 14 ans.

Vendredi Clément dans la porte. Dimanche se repose... Lundi Fernande TOMBE enceinte... Neuf mois, elle TOMBE malade, se RELÈVE; c’est l’aînée, Marie, qui vous dit, 66 ans plus tard :

Chère maman,

J’ai hérité de ces talents que je partage avec plusieurs autres membres de la
famille : le respect de ma langue, l’amour des mots, de la musique et des arts en général, héritage dont je suis fière. J’ai hérité aussi de la fierté du devoir accompli, fierté de ce que j’ai réussi de mieux dans ma vie, mes enfants, fierté de toujours faire mieux et plus avec peu, le tout sur un fond d’orgueil
bien Fleury, jumelé à une grosse poignée de petits choux collards.

De mon père, j’ai un peu hérité son côté manuel qui équilibrera l’enfant rêveuse et solitaire que j’ai été, ce qui lui évitera de se perdre dans les
méandres de son imaginaire.

1944. Création d’Hydro-Québec; débarquement des soldats canadiens en Normandie; première visite du Général de Gaule au Québec; Maurice Duplessis arrive au pouvoir; la conscription obligatoire sème la colère au Québec.

Vendredi Clément... Dimanche se repose... Lundi TOMBE enceinte. Neuf mois TOMBE malade... SE RELÈVE; c’est Gaby,qui vous dit à 65 ans :

Chère maman,

Je réalise que vous m’avez légué beaucoup, beaucoup plus que vous ne le pensez.

D’abord à travers tout le bagage héréditaire des Fleury et des Tremblay, vous m’avez légué une grande partie de moi-même dont je suis fier : des ressources personnelles abondantes et une créativité professionnelle qui m’ont toujours permis de me réaliser pleinement, de bien réussir
professionnellement et d’être heureux dans tous les milieux où j’ai eu à œuvrer. Vous m’avez légué, à travers votre exemple, cette passion du
travail bien fait, du travail qui commence tôt le matin et qui se termine tard le soir. Cette fierté des résultats accomplis après y avoir mis les efforts nécessaires et de ne jamais reculer devant les difficultés. Vous m’avez
transmis aussi ces habiletés à vivre en harmonie, d’apprécier et d’être hautement apprécié par les gens que je côtois au quotidien.

Vous m’avez légué cette grande sensibilité des Fleury et des Tremblay pour les belles choses, pour la musique, les beaux-arts, la culture, les beautés renouvelées que nous offre sans cesse notre environnement à travers les saisons. Vous m’avez légué votre sens de l’émerveillement … que vous conserverez certes jusqu’à votre dernier soupir!

Vous m’avez transmis l’ESSENTIEL pour être heureux et être confiant dans la vie : à travers toutes les difficultés que je vous ai vue surmonter, à travers tous ces beaux événements où je vous ai vue heureuse, vous m’avez transmis la Foi en un Être supérieur, la Foi de vos parents, celle de nos ancêtres, celle qui demeure un mystère mais qui donne tout son sens à la VIE.

Bon Anniversaire, maman.

1945. Un projet est déposé pour installer l’électricité dans les campagnes. L’Allemagne capitule. Le premier ministre Mackenzie King annonce un rationnement de la viande. (Duplessis crée un bureau de censure du cinéma.) Un congé national est décrété pour célébrer la fin de la guerre.


Vendredi Dimanche Lundi... TOMBE TOMBE SE RELÈVE; c’est Gilles, à 63 ans, qui vous joue ce compliment:


Chère maman,

Je me suis toujours demandé pourquoi je trouvais normal d’avoir 3 jobs.
C’est peut-être de vous avoir vue longtemps en mener 11 de front.

Je me rappelle que, devant une question qui nous paraissait sans réponse, vous nous faisiez sentir que tout problème a une solution. Et bien moi, j’en ai fait un métier : je répare des affaires qui ne répondent plus.

Je me rappelle aussi de vos soirées d’autrefois au piano. Ce fut la bougie
d’allumage qui m’a fait sauter sur mon accordéon et qui m’a donné le goût de faire chanter et danser tout le monde. Parce que moi aussi, j’aime ça quand les gens sont de bonne humeur.


1946. Création du Ministère québécois de la Jeunesse; épidémie de poliomyélite; arrestation de 523 témoins de Jéhovah à Montréal qui accusaient les Canadiens français de haïr Dieu et d’être une honte pour le Canada.


Vendredi dimanche lundi,TOMBE TOMBE SE RELÈVE ;c’est Raynald qui vous dit, au bout de ses 62 ans :

Maman, c’est bien possible que, des disparitions et résurrections épisodiques
de papa, j’aie hérité de mon côté pirate des Caraïbes. Que voulez-vous? Moi aussi, j’aime partir et j’aime revenir. Mais vous, vous m’avez inoculé, comme à tous les autres, ce sens de l’assiduité obstinée qui me permet maintenant de mettre le cap sur des choix qui font mon bonheur.

Exprimée autrement, je dirais que j’aimais savourer vos tartes aux bleuets, mais j’étais conscient qu’il fallait d’abord aller les ramasser.

1948. Le fleurdelisé devient le drapeau officiel des Québécois;
(Terre-Neuve, à son premier referendum, dit NON à son entrée au sein du Canada, puis il dit un faible OUI à sa deuxième consultation.)

Vendredi dimanche lundi,TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est « votre rebel de fils » Claude, qui, à 61 ans, vous confie ce secret :

Ayant un jour sérieusement songé à abandonner mes études, je vous dois, maman «l'obligation» de persévérer, d'investir pour devenir, malgré votre plus grand souhait, un bien meilleur ingénieur qu'un curé (c'était de toute façon désespéré). Je vous dois aussi, par votre exemple, l'obligation de demeurer droit, honnête, impliqué dans mon milieu, fier, compétent, travailleur et soucieux de l'environnement.

Il n'est jamais trop tard pour le dire: merci infiniment, maman, pour tout ce que vous m'avez donné et que j'ai pu transmettre à mes enfants. Que cette magnifique fête se perpétue encore longtemps.


1950. Claire sera la première à ne pas naître à la maison et étrennera la maison que Clément construit à l’Ascension. Les autres naîtront à l’hôpital, car on ne voudra plus prendre de risques. Mais il faudra continuer à payer pour y accoucher. L’assurance-maladie couvrira ces frais quelques années plus tard. On disait alors que les femmes
étaient parties « acheter » à l’hôpital.


Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE,c’est Claire qui, à 59 ans, se livre ainsi :


L’héritage de ma mère.

En sondant ma mémoire plutôt vagabonde,

Celle qui a erré longtemps sans retenue. Je suis remontée à la source de mes origines pudibondes. Pour découvrir de qui sont mes années devenues. J’y ai rencontré celle, souvent seule au milieu de ses enfants. Solide comme le chêne qui résiste au vent. M’apprenant à retrousser mes manches. Car on s’en sort en travaillant, pas en se lamentant.

Celle déterminée à nous faire instruire. Déterminée à nous sortir de la misère. M’indiquant par là que le chemin à suivre ne se gagne pas qu’à coups de prière. L’importance que j’accorde au sens de l’effort. Ma détermination à aller au bout d’un projet. Mon besoin d’action, de renouveau et de culture. Je les ai hérités de vous, maman. Merci de ce legs. Qui a fait de moi une femme forte et ouverte.

Bonne 90è année!

1951. La famille Plouffe est diffusée à la radio de Radio-Canada.

Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est Martine qui atterrit de la Californie pour fêter.

Ma chère maman,

Chaque fois que je regarde nos photos de famille, je suis frappée par les points communs que nous partageons : toutes les deux, on aime la vie,
on aime rire et taquiner. On adore danser et prendre un p’tit verre de vin. On aime la bonne cuisine, avec la différence que moi, je ne sers pas les hommes en premier. Parlant d’eux, il faut se l’avouer, on aime les hommes tous les deux. Vous me l’avez rappelé assez souvent : « Toi, il te faut une paire de culottes autour ». C’est vrai que j’aurais dû fermer les yeux des fois… j’aurais
divorcé moins souvent.

1953. Le Survenant est écouté religieusement à la radio.

Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est Jacinthe, à 56 ans, qui se rappelle :

Je ne me souviens pas exactement à quoi vous faisiez référence, mais
vous disiez parfois: «C’est de la banque!» pour dire que ça pourrait servir plus tard ou qu’on n’en manquerait pas. Alors, à tout bout de champ, on réutilisait l’expression en rigolant. De là peut-être cette prévoyance pour ne pas être prise au dépourvue,...genre plein le congélateur…


1955. 150,000 personnes assistent au défilé du premier carnaval de Québec;
Maurice Richard est suspendu des séries éliminatoires et des émeutes éclatent à Montréal. La télévision neigeuse fait son entrée à L’Ascension.

Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est Jean qui vous parle :

Ce que vous m’avez laissé le plus, maman, c'est le goût à la fête. C’est probablement aussi un excellent sens de l’orientation, surtout la nuit et mon attrait pour l’hiver. Vous m’avez peut-être transmis ces penchants sans le savoir lors de ce fameux voyage en snow en direction de l’hôpital d’Alma,
où vous alliez accoucher de moi par une terrible tempête de neige.

1956. L’affaire Coffin passionne la province. La censure interdit un film avec Marlon Brando qu’elle voit comme une source de perversion et de violence.

Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est Hélène, la dixième qui vous fait cet hommage :

Chère maman,

Vous m'avez légué, avec une énergie rayonnante, votre volonté et ce goût
d'aller de l'avant. C'est bien vous qui nous avez montré à lever les yeux pour avoir le nez au vent. Ce n'est pas sans efforts, on le sait bien, que vous avez produit des navigateurs, des chefs, des personnes debout. Vous nous avez faits fiers, combattifs, joyeux lurons et tous prompts devant les défis. C'est avec fierté que je vous montre en exemple. Vous êtes encore, à 90 ans, toujours une très bonne élève. Une première de classe. Bravo Maman.

1957. La loi oblige encore maman, pour être hospitalisée, d’avoir l’approbation signée de son père, de son mari ou d’un tuteur. La loi ne sera abrogée qu’en 1969.
Mais Maurice Richard marque quand même son 500ème but.

Vendredi dimanche lundi, TOMBE TOMBE SE RELÈVE, c’est Rachel, le bébé, qui, à 51 ans, avant de tirer le rideau, vous faisait ce petit bilan de vos relations de femme à femme :

À la fin de ma vie, je me sens en paix avec maman et s’il y a une chose dont
je lui suis redevable, c’est de m’avoir appris à me battre…Je lui dois cet esprit combatif qui m’a fait embrasser de nombreuses causes tout au long de mon parcours.

Voilà pour la fable à se souvenir, nous avons tous parlé. C’est une belle fête. Une dame de 90 ans peut jeter un regard circulaire sur une ramée d’enfants, de petits-enfants et d’arrière-petits-enfants qu’elle ne se lasse pas de rassembler. Peu d’entre nous auront la chance à son âge de vivre pareille expérience.

Cette dame est de cette génération qui a peuplé le Québec au moment où il fallait du monde, mais qui a vite compris que ça ne suffirait pas d’y mettre la quantité, qu’il
fallait aussi y mettre la qualité en nous donnant à tous la possibilité de nous instruire et de nous sortir de notre tiers-monde personnel. C’est l’histoire du Québec tout entier qu’elle a écrite, ce genre d’histoire de modernisation que tous les pays en voie de développement essaient de se donner actuellement.

Donc pas de regrets. Quand on y pense, maman, finalement, s’il y avait eu
planification des naissances à votre époque, on ne serait pas tous là à soir! Si on se fie à la famille d’aujourd’hui de 0, 1, 2 ou 3 enfants, il n’y aurait peut-être pas de p’tit Floren, Jacques ne serait pas aux p’tits oiseaux avec sa Claire, pas de belle Joëlle non plus Vos yeux, maman, à 90 ans, ont peut-être tendance à loucher entre le passé et le présent. C’est normal. Mais ce qui constitue encore pour nous tous un vif stimulant, c’est qu’ils continuent aussi à regarder en avant. Grâce à vous, nous sommes un petit miracle de réussite : nous étions pauvres, nous sommes riches : nous étions nombreux, nous le sommes encore plus. Et heureux de l’être!

FINALEMENT, Maman, à 90 ans… qu’est ce qui vous manquerait bien encore? Comme ultime expérience? Nous avons décidé de vous faire un cadeau pas comme les autres.

Bonne fête, maman!

Quelques photos de cette belle fête où Mamfleur a fêté ses 90 ans entourée de ses enfants et de leurs compagnes(ons). Rires et sourires ont façonnés les visages de tous durant cette belle soirée. Elle était en grande beauté et nous souhaitons tous fêter encore avec elle ... le ?

diaporama  "Mes 90 ans"



Bravo pour vos 90 ans!


Nous sommes fiers de vous et surtout contents de vous compter parmi nous. Nous souhaitons que ce blog vous permette de continuer à vivre en vous enrichissant et pouvoir transmettre vos messages à tous ceux qui vous entourent.

Gaby, Marie, Gilles, Raynald, Claude, Claire, Martine, Jacynthe, Jean et Hélène